"Un jeune sur dix a déjà tenté un "jeu" d'évanouissement
Amener son corps à la suffocation pour "faire comme les copains", expérimenter un jeu jugé "rigolo" "des effets particuliers, bizarres" : telles sont les justifications avancées par les garçons et les filles qui ont tenté le jeu du foulard ou d'autres pratiques dites de "non-oxygénation", interrogés par Ipsos pour le compte de l'Association de parents d'enfants accidentés par strangulation (Apeas).
Un jeune sur dix a fait l'essai d'un jeu d'apnée ou d'évanouissement.
Menée du 29 novembre au 8 décembre 2011 auprès d'un échantillon représentatif de 1 012 enfants âgés de 6 à 15 ans, cette enquête, financée par le ministère du travail, de l'emploi et de la santé, et rendue publique jeudi 26 janvier, montre qu'un jeune sur dix a fait l'essai d'un jeu d'apnée ou d'évanouissement. Parmi ceux-ci, un sur quatre affirme avoir vu quelqu'un se livrer à cette pratique qui consiste, par différents moyens, à comprimer la carotide.
C'est essentiellement à l'école et plus particulièrement dans la cour de récréation qu'ont lieu ces jeux menés en général collectivement et qui concernent surtout les garçons. Toutes les catégories sociales sont concernées.
La dangerosité de ces pratiques et les séquelles qu'elles peuvent entraîner échappent au plus grand nombre : la moitié des jeunes interrogés pour le sondage et avouant se livrer au jeu du foulard ou à un jeu équivalent n'ont pas conscience qu'ils peuvent conduire à la mort. Le goût de tester des sensations inconnues domine, combiné au sentiment d'invulnérabilité fréquent à l'adolescence. Les deux tiers de ces jeunes ignorent également qu'ils risquent de porter atteinte à leur cerveau. Les seuls désagréments qu'ils avancent sont l'évanouissement (60 %) et le danger de ne pouvoir reprendre son souffle (59 %). A l'inverse, les jeunes qui affirment n'avoir jamais joué à ces jeux se montrent beaucoup plus conscients de leur dangerosité.
Il n'existe pas de statistiques officielles permettant de quantifier le nombre de victimes de ces jeux de strangulation, mais les spécialistes et les associations évoquent au minimum un décès par mois en France.
La mort, involontaire la plupart du temps, intervient par défaut d'oxygénation cérébrale qui déclenche un malaise vagal suivi d'un arrêt cardiaque. Le plus souvent, c'est lors de la réitération au domicile d'expériences faites en groupe à l'école que surviennent les accidents fatals.
Depuis une dizaine d'années, grâce notamment à la mobilisation de parents ayant perdu un enfant dans un accident lié à ces jeux, l'opinion est sensibilisée au sujet. Insuffisamment cependant, estime l'Apeas, qui demande que le combat contre ces pratiques dangereuses soit intégré aux programmes scolaires et relayé par tous ceux qui sont en contact quotidien avec les enfants. La difficulté étant de délivrer auprès des jeunes un message informatif qui ne soit pas incitatif.
Sylvie Kerviel"
Article paru dans l'édition de Le Monde le 27.01.12
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